Le ravitaillement nous fut envoyé de St Quentin, nous recevions des pains carrés en provenance des Anglais, des conserves, des biscuits, du chocolat, du tabac, du vin, la nuit commençait à tomber, je remarque dans la campagne une chaumière délabrée, à 300 mètres de la route je pesais qu'à cet endroit, je trouverais un puits, un peu d'eau à boire "du fait que le vin me faisait mal à l'estomac". Cette chaumière me semblait être abandonnée, arrivais à l'entrée, je trouvais une jeune femme, tenant un bébé dans ses bras, elle tremblait, elle avait peur. Pour la rassurer, je lui dis que j'étais un soldat français que je venais lui demander un peu d'eau à boire, rassurée, elle me dit, venez mon mari est là: il s'était caché avec deux autres enfants, c'était des réfugiés de Maubeuge. Il me donna à boire de l'eau et il me fit entrer dans la seule pièce disponible, à ce moment je leur dis que la guerre est finie, que moi même, j'avais lu la circulaire ; que l'Armistice était signée, qui était clouer à la porte de la gare militaire, ils l'ignoraient, ils ne savaient pas: la femme allumait une petite lampe à huile il faisait nuit, je voulais quitter, et rejoindre mes camarades au bar de la route :ha, non ,me dit-elle, mon mari et moi nous ne le voulons pas, vous coucherez ici, vous resterez avec nous, vous coucherez et mangerez avec nous, le mari apportait du bois, allumait du feu dans un vieux fourneau; il me dit, vous nous avez apportez l'espoir, le bonheur, des bonnes nouvelles, vous resterez avec nous, j'ai encore quelques pommes de terre que j'avais planter dans la Haie en cachette des Boches, car ces salauds
(Retranscription décembre 2012 Philippeau Juliette 1er L/ES)
nous prenaient au jardin tout ce que nous avions de légumes plantés, heureusement que nous avions pu sauver notre chèvre, la biquette qui est cachée dans un trou, c'est avec son lait que nous élevons nos trois enfants, j'admirais cette famille d'ouvriers, de paysans qui n'avaient rien, mais qui du fond de leur cœur m'offraient le peu qu'ils avaient, je regardais cette petite femme dédoubler le seul et unique lit qu'elle avait avec ce qu'elle possédait, c'est-à-dire de vieux chiffons, de vieux jupons, j'avais peur de les contaminer avec la vermine, des poux que j'avais, je lui en fis la remarque, elle me dit je pense donc, nous en avons aussi, songer avec nos trois enfants, et nous n'avons pas de linge, et très peu d'eau, car mon mari va chercher cette eau à la rivière à 3 kilomètres d'ici. Ses pommes de terre étaient cuites, la soupe aux orties était servie, je leur demandais deux bouteilles vides, où je transvasais le vin de mon bidon, ils me disaient qu'ils n'avaient pas goutté au vin depuis 1914, les enfants qui jouaient auprès de moi, je leur donnais à chacun une tranche de pain anglais, ils croyaient être du gâteaux et le reste du carré, je le confiais à la maman et au papa. Le tabac et sur la table boiteuse, je déposais les boites de conserves et le chocolat. Ce repas fut remplis de questions, de joie, d'espoir, j'étais fatigué, je me couchais sur la paillasse, a 6 heure j'étais réveillé, j'avais bien dormi et j'avais récupérer des forces, un bol de lait bien chaud m'attendais sur la table, certainement du lait de la biquette, je l'absorbais…
(Retranscription décembre 2012 Philippeau Juliette 1er L/ES)
Et je prenais congé de ces braves gens, en les remerciant de
leur hospitalité et de leur gentillesse.
J'arrivais à la route, au moment de la distribution du café
les hommes se décrottaient, cherchaient à se faire une beauté, car
il avait été dès que nous allions traverser la ville de Saint Quentin.
La colonne de poilus se mit en mouvement, elle arrivait
à 10h environ à l'entrée de la ville, nous pressions la route
centrale. Tout était démoli saccagé, il n'y avait personne.
Seul un groupe de réfugiés, qui prenait la route de Pont Saint Nuriscent
arrivait sur la place de l’hôtel de ville. Une douzaine de personnes
nous regardaient tristement. A la sortie, nous gagnions nos
cantonnements, dans des baraques en bois à moitié démolies.
Huit jours après, c'était le recensement des hommes du matériel,
ensuite nous reprenions la route par étape, mais cette fois
en direction de Paris.
Les bataillons de réserve étaient dissous et amalgamés dans
ceux de l'active, nous recevions de très gros renforts.
Je remplissais les fonctions de major de cantonnement et le contrôle
des cuisines, j'avais un 1er classe comme adjoint c'était un curé
le matin il allait dire sa messe à l'église de Nogent et à 8h
il venait déjeuner avec moi, c'était un bon vivant un brave homme.
Un matin, il arrivait mécontent, contrarié, il me raconta ce qui
lui était arrivé. Il me dit comme d'habitude; à 8h je franchissais
(Retranscription décembre 2012 Amélie Gonzalez 1er L/ES)
Le portail de la cour pour venir déjeuner avec vous.
Un poilus, se dresse devant moi, il avait la poitrine garnie de décorations,
il m'interpelle d'un ton autoritaire, en me disant: «on ne me salut plus
à présent, donnez moi votre nom, je vais vous signaler, vous donnerez
de mes nouvelles». Je regardais mon pauvre curé qui était devenu
rouge comme un coquelicot. Je pensais qu'il allait avoir un
coup de sang, je le calmais de mon mieux et je me rendis
au portail. Et là je trouvais ce poilus en question avec ces
nombreuses décorations, la légion d'honneur, je le félicitais
et lui demandais son nom. Voilà livret militaire, montraient
nom est Lartigau aviateur. Il était bien incorporé au 6ème bataillon
à la 1er compagnie comme 2ème classe. Je l'étudiais et je jugeais que
c'était un nord africain. Je retournais auprès de mon brave curé
et je lui dis ce que je pensais de ce poilu. Et lui conseillais de
faire faire des recherches à la grande chancellerie à Paris.
Mon curé était secrétaire du colonel avec une permission en règle
il se rendit à Paris, à la chancellerie et là l'affaire se déclencha
mais qui demanda des mois de recherche. Et un beau matin les
gendarmes embarquaient, le bonhomme. Mais dans l'intervalle, il avait
fait des victimes, notamment chez un négociant en vin, où il avait
marié la fille, même il m'a été raconté qu'on lui avait
la médaille de sauvetage, suite à un incendie qui avait eu lieu
à Nogent près de Creil et un banquet, un fête avait eu lieu en son honneur.
Ou sont les autorités?... Ce fut un scandale.
(retranscription décembre 2012 Amélie Gonzalez 1er L/ES)
L'avion du lieutenant aviateur Lartigau avait été abattu
entre les lignes, son corps fut retrouvé près de son avion
mais n'avait plus de papiers.
Mon brave curé était content d'avoir réussi à démasquer ce coquin,
cette canaille. Il passa au conseil de guerre où il récolta
ce qu'il avait mérité: la dégradation militaire suivit de prison.
Mon adjoint sur le papier, le curé soldat de 1ere classe, coucheré
la cure et après avoir dit sa messe, il venait déjeuner avec moi
muni d'une boîte d’anchois ou de charcuterie il avait un bon
coups de fourchette et ne négligeait pas le bon vin. Il avait fait
venir un tonneau de vin de 50 litres environ. Nous l'avions remis
sous l'escalier dans le local où je couchais, en riant il
me disait que c'était du vin pour dire sa messe. Mais
véritablement, il nous servait à boire pour l'après messe.
Quelques jours après, il me dit «je pars ce soir pour
Marseille, je rejoins mon recrutement en vu d'être
démobilisé, si un jour vous passez à Marseille
venez me voir, je suis curé à la Corniche.
(Retranscription décembre 2012 Amélie Gonzalez 1er L/ES)